Michel
Jamsin
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La sensualité picturale
La picturalité est essentiellement faite, pour moi, de deux sensualités
indissociables : celle de la couleur et celle de la matière, c'est-à-dire de la
surface, de la texture du matériau qui sert à peindre.
La sensualité de la couleur est naturellement visuelle, mais aussi
émotionnelle. Celle de la matière est visuelle mais particulièrement tactile,
même si on ne caresse pas des doigts un tableau.
Tous les matériaux ne possèdent pas les qualités sensuelles qui me satisfont.
J'ai tôt rejeté la peinture à l'huile avec ses matités inopportunes, ses
craquelures aléatoires, les traces des soies de porc, son aspect graisseux, ses
lenteurs au séchage… Je n'ai pas eu beaucoup de plaisir avec l'acrylique en
tube, matériau mat, inerte, peinture opaque et plate pour affiches.
Par contre la couleur cellulosique, émail somptueux qui permet les
superpositions de couches de couleur vibrante, matériau naturellement satiné,
qui vit et s'arrondit au séchage, me permet toutes les audaces de la couleur,
que j'aime haute, intense, variée, contrastée.
J'ai tenté les effets fluorescents des contrastes simultanés et
complémentaires, les verts acides et le rouge vif, la plus belle couleur,
flamboyante et sans compromis. Les harmonies de jaunes forment de grands carrés
de lumière. Les surfaces lisses accolées aux surfaces grenues se mettent en
valeur réciproquement.
Je disais : "La couleur c'est la vie." Et je bannissais les gris.
Expérience récente : le noir
Récemment, de l'acrylique noir en pots (de trois kilos par exemple), épais
comme une pommade, m'a ouvert le champ d'une autre sensualité de couleur et de
matière.
Il s'agit de plonger un large pinceau dans un grand pot de "goudron" noir et
de l'étaler sur la surface de la toile, de forcer la couche épaisse à inscrire
et à conserver la trace incisive du geste. En noir sur noir, les visages, les
objets peints deviennent une écriture de signes dont les rythmes sont ceux de la
main qui dessine. En noir sur noir, c'est le reflet satiné de la lumière sur les
reliefs de la surface qui montre la peinture.
Dans cette régression de la couleur à un niveau sous zéro (le noir est
l'absence de couleur, mais c'est quand même une couleur), la sensualité tactile
et visuelle est d'un tout autre ordre : plus austère, plus intérieure, plus
âpre. La peinture séduit moins qu'elle n'impressionne.
Le retour des couleurs
A partir de cette base sont apparues progressivement d'autres couleurs. Mais
cette fois, il ne s'agit plus de variations libres, mais bien de teintes à
valeur quasi symbolique. Un ocre argileux est la couleur de la terre. Une
ponctuation rouge vif se dépose parfois sur le noir comme pour lui donner du
cœur, du sang. Un vert sélectionné apporte ses veines minérales de bronze
patiné.
Des glacis transparents, déposés liquides à l'horizontale, unifient les
masses entre elles, raffinent leurs coloris et marquent les reliefs des
pâtes.
Et après séchage complet, deux couches de cire polie à la brosse lustrent la
peau de la peinture.
D'autres couleurs attendent dans leur pot. Les tableaux se composent
maintenant d'un petit nombre de nuances. La couleur est nue mais très charnue.
Elle se pose directement, spontanément, sans virtuosité, en formes simplifiées,
en silhouettes presque primitives.
Michel Jamsin, mai 2002
Comment se forme le goût
? En 1958, j'avais 17 ans. Je dérivais solitaire à la foire de
l'Exposition Universelle de Bruxelles. Je suis entré dans une tente où était
annoncée une attraction remarquable : une femme panthère.
Je me suis trouvé seul dans un espace obscur et silencieux,
cabinet de curiosités insolites : des reptiles globuleux empaillés, des
squelettes siamois, des fœtus flottants, des objets de magie primitive, …
Une belle femme aux yeux sombres était assise à l'écart, sur
une petite estrade. Elle portait un peignoir et semblait s'ennuyer, le regard
indifférent. En suivant les étagères où s'alignaient des bocaux remplis de je ne
sais quoi d'innommable, je progressais vers elle. Quand je fus assez près,
soudain, d'un geste vif, elle écarta les pans du peignoir et dénuda ses cuisses.
Elles étaient couvertes de taches brunes.
Défaut de pigmentation
ou artifice ? Je les regardai quelques
instants puisque c'est pour elles que j'avais payé mon entrée, puis, troublé, je
me tournai à nouveau vers les bocaux pendant qu'elle rajustait son vêtement.
Est-ce depuis que j'aime ces lieux étranges, musées ou temples,
où des choses humaines ou animales trempent dans des vases, où des mannequins de
cire paradent et reconstituent des anatomies aberrantes, où des catafalques d'or
et de verre révèlent les momies incrustées de pierreries
?
La vie et la mort, le séduisant et le répulsif, le vrai et le
faux confondus en trompe-l'œil.
Comment peut-on n'être pas un touche-à-tout en art
?
J'ai bien dû constater, un jour, que je n'ai pas beaucoup de
suite dans les idées. Je travaille dans trois catégories : la peinture surtout,
la sculpture à l'occasion, parfois l'écriture.
Et comme dans l'ordinateur, chaque catégorie se compose d'une
série de sous-catégories.
L'écriture se partage entre des textes pour le théâtre, des
contes et feuilletons pour la radio, des histoires courtes, des chansons…
La sculpture s'est d'abord manifestée en terres cuites,
puis en objets-momies composites, et finalement en assemblages colorés et
lumineux, parfois en décors de théâtre ou en installations.
Et la peinture? Elle évolue selon la dérive
intransigeante de l'inspiration, capable parfois de virages brutaux. Les débuts
sont teintés d'expressionnisme ponctué d'un peu de fantastique et d'humour
(noir). Puis apparaissent les grandes vignettes de romans-photos qui explorent
les limites de l'imagerie, du kitsch et de l'anecdotique pour les transcender
par la picturalité agissante.
Soudain, le geste pulsionnel et rythmique devient prépondérant,
avant de faire place à des peintures-collages où les objets viennent s'accoler à
la surface peinte au pochoir et au spray.
On repart avec de nouvelles images et des portraits aux
stylisations sophistiquées. Puis apparaissent les silhouettes qui débouchent sur
des tableaux en faux marbre et des travaux à partir des pictogrammes routiers.
Vient le temps des grands personnages dessinés comme des graffitis
automatiques.
Actuellement une nouvelle voie s'est ouverte : des tableaux en
acrylique épais, noir sur noir, qui se lisent surtout par les reflets satinés
des reliefs. Puis la couleur est revenue progressivement dans la matière épaisse
comme une pommade, déposée avec un pinceau brut, en un geste élémentaire,
préhistorique.
Le principe essentiel qui nourrit mon désir de peindre reste la
sensualité du matériau traité et l'importance prépondérante de la couleur,
qu'elle soit variée, nuancée, haute, ou comme maintenant, simplifiée, parfois
unique (difficile à photographier et à reproduire sur un écran).
Au début j'étais troublé par ces besoins de changements qui
s'imposaient à moi. Et puis j'ai découvert la sensation de l'unité dans la
diversité. Après tout, c'est aussi une attitude artistique d'explorer les voies
de l'art, surtout celles inconnues qui amènent à l'imprévisible.
Les touche-à-tout de l'art sont capables, à chaque
manifestation, de m'étonner. J'aime leurs méandres et leurs labyrinthes à
surprises davantage que la ligne claire et droite de ceux "qui ont trouvé leur
voie" ("leur style" comme nous disions entre étudiants des beaux-arts impatients
de nous démarquer.)
Un conte court
Ayant fait fortune en fabriquant toute sa vie de fausses
sculptures de Rodin en bronze, un faussaire put enfin prendre sa retraite et se
consacrer à sa vocation : réaliser de petites tours Eiffel en faux bronze.
M. J. février
2002
Michel
Jamsin a une peinture qui fait souvent penser au coup de poing. A 26 ans, sa
première exposition est, en plus, un coup de maître. L’expressionnisme a
certainement été la bonne louve de ce « Romulus » de l’art wallon.
Ses personnages ont une présence monumentale obsédante. Le ciel semble écraser
les plus grands.
Michel Jamsin exprime, sans doute, l’obsession de sa
génération, celle de la prison quotidienne où se débat l’homme déchiré entre
ses devoirs et ses désirs.
On a vu, il
y a quelques années, croître dans les rangs des élèves de Gustave Camus, ce
recours à un expressionnisme fantasque, que l’on a appelé également « sauvage »
Ce phénomène était d’autant plus étonnant que l’œuvre de Camus leur offrait un
miroir de rectitude et de paix idéale, encore que ces derniers temps, une
certaine fièvre ait conféré une nervosité baroque nouvelle au graphisme du maître
wallon. (…)
(Premier article de Paul Caso pour la première
exposition personnelle à la Galerie Albert 1er en mai 1968)
"Michel Jamsin. De là à là" à
commander à l'artiste, relate l'évolution chronologique de son travail jusqu'en
1992. 68 pages, une centaine d'illustrations couleurs.
Prix
20 €, port
compris.
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2002 - 1978
 "ETAGERE
LE DUEL" 2002 60X80 Acrylique
sur panneau
 "ETAGERE
LE CHIEN" 2001 120x80 Acrylique
sur panneau
 "ETAGERE
LE PLONGEON"
2001 120x80 Acrylique
sur panneau
 "CERISES
EN HAUT" 2000-01 120x80 Acrylique
sur panneau
 "POEME
A DEUX MOTS" 2000 60x90 Acrylique
sur panneau
 "TRIO
AU SQUELETTE" 1997 170x122 Cellulosique
sur panneau
 Diagonale
II 1973
190
x 165 cm
.JPG) Visage-Puzzle
1980 125
x 170 cm
.jpg) Défense d'Obéir 1983 170
x 125 cm
.JPG) Les
Promeneurs 1985 125
x 170 cm
.JPG) La
Mèche Flamboyante 1985
125
x 170 cm
.JPG) Rose
1986 125
x 170 cm
.JPG) Tête
de Nounours
1991 60
x 60 cm
.JPG)
Dames
de Confidences Largeur
32 cm
.JPG) Les
Scrupules 125
x 125 cm
.JPG) Echange
de Confidences 1978 125
x 125 cm
.JPG) Les
Souvenirs 1978 125
x 125 cm
.JPG)
Monsieur
Charlie et ses élèves 170
x 125 cm
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